Être ou ne pas être
De quel côté se trouvaient les Français durant la Guerre des Gaules ? En Provence alors que l’Ardèche soutenait les légions romaines ? À Reims, chez les Rèmes qui furent des alliés fidèles de César ?
Charlemagne était-il un Gaulois ou un Germain ? Il parlait allemand, il a été sacré empereur à Rome et son tombeau se trouve à Cologne. Les
premiers rois capétiens parlaient allemand et avaient encore de la famille en Allemagne. Jeanne d’Arc a été brûlée vive par un jugement français de la Sorbonne soutenant les intérêts parisiens, bourguignons et anglais. Lorsque la Marseillaise parlera quelques siècles plus tard du sang impur devant abreuver nos sillons, elle vise les coalitions étrangères, mais aussi l’aristocratie française accusée d’être d’origine allemande depuis son arrivée en France avec les Grandes Invasions.
Sans sa dimension européenne actuelle, la France est condamnée à échouer dans la nouvelle révolution scientifique du 21e siècle. Les virus, les crypto-monnaies, le dollar, le yen, les marchés financiers et boursiers n’ont pas de limites ni de frontières. La mondialisation touche tous les États, y compris la Chine, la Russie, l’Ukraine, le Qatar et le Vatican.
Et pourtant la France existe. Notre pays vit par sa langue, sa culture, son droit, ses territoires actuels et leurs défenseurs… Si la France n’ existait réellement pas, les Laboratoires Fabre ne seraient pas français, et la population d’Oradour n’aurait certainement pas été massacrée. Et nous ne serions pas non plus le pays ayant dans l’histoire du monde mené le plus grand nombre de grandes batailles, loin devant l’Allemagne ou la Russie… Et si nous n’ étions pas des Français, il n’y aurait plus autant de journaux ou de livres écrits en français. On ne sait pas exactement quand la France a commencé à exister en tant que peuple des Français. Mais visitons les Maisons d’écrivain, les Maisons des Illustres, les châteaux anciens… L’esprit français a défini la France qui a forgé elle-même cet esprit français. Une définition d’existence, c’est aussi, dans tous les sens du terme, une fonction réflexive.
Matthieu Delaygue