On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve

En deux décennies, nous avons pris plus de distances avec le 20 e siècle que la Renaissance l’avait fait avec le Moyen-âge. Les mentalités ont changé, les peuples n’ont plus les mêmes ambitions. C’est un scénario sans précédent depuis la chute de l’Empire romain.
La perception de l’Histoire n’est plus la même. Elle s’était ordonnancée par rapport à un système reposant sur les trois grands traités internationaux ayant équilibré notre monde depuis 2 siècles : Le Traité de Vienne de 1815 dont les bienfaits ont été balayés par les déclarations de guerre de 1914. Le Traité de Versailles de 1919 dont l’échec fut total. Le Traité de Yalta de 1945 qui est obsolète.

Chacun de ces trois Traités était une sorte de compromis accepté par tous après de longues guerres internationales clôturées par la victoire d’un des partis. Il y a donc de fortes probabilités pour qu’un quatrième traité d’équilibre international ne puisse voir le jour qu’après une nouvelle grande guerre. Cela donnerait raison à Héraclite lorsqu’il annonçait aussi : La guerre est le père de toutes choses.

Si les analyses de l’histoire évoluent, qu’en sera-t-il du sentiment artistique et culturel ? C’est peut-être la seule chose qui perdurera. Nos châteaux, nos cathédrales, nos musées se sont situés en dehors du temps, ils transcendent les siècles pour nous montrer le souffle indicible de la beauté, l’absolu des choses et des personnes, au-delà de leur disparition. Ils sont une forme de notre éternité. Même si les dés sont lancés, pour une suite de jeux et de drames qui se déroulent déjà sur un autre fleuve.


Matthieu Delaygue