L’essence de la tragédie
La Guerre de 1870 relance une guerre vieille de mille ans. Celle des tenants germaniques de l’Empire romain d’Occident, identifiés à l’Allemagne, contre la France d’Hugues Capet et de Vercingétorix dont le père voulut être roi. Les batailles de Bouvines en 1214, de Rocroi en 1643 et d’Austerlitz en 1805 seront des victoires françaises contre le Saint-Empire. Pavie et Waterloo, tout comme Sedan seront nos défaites.
Le 20 e siècle s’est ouvert sur un dramatique conflit entre d’un côté les puissances coloniales et maritimes anglo-françaises et russes contre les puissances désormais continentales d’un nouvel Empire romain germanique. Le Tsar et le roi d’Italie ayant commis l’erreur de vouloir participer à une guerre qui ne les regardait pas. Cela leur coûta leur trône avec le passage de leur pays à la dictature. Lénine qui appréciait Mussolini regretta profondément son passage au fascisme anti-bolchevique. L’Amérique rejoignit l’Angleterre et la France en 1917 lorsque ces deux empires furent autant épuisés que les forces germaniques, et elle put ainsi commencer à s’emparer de nos empires coloniaux et de nos routes maritimes. Ce fut la décadence de l’Europe, la famine, la réapparition des haines de la tragédie, les affreuses réalités de l’Histoire lorsque celle-ci déchaîne ses forces obscures.
En toile de fond actuelle, le risque essentiel de l’Amérique est de voir la Russie et la Chine créer une nouvelle monnaie internationale concurrente du dollar, tout en établissant des routes terrestres sur une nouvelle Eurasie, en liaison avec celles d’Afrique et du Moyen-Orient. Cela signifierait une remise en question de l’Empire maritime anglo-américain. Dans cette suite de drames, à l’exception de ses régions Est et Nord la France a été épargnée architecturalement. En sera-t-il de même tout au long du 21 e siècle ?
Quel drame humain cela serait, à l’image de celui vécu par l’Ukraine. Et quel drame de civilisation. Notre monde de châteaux, de cathédrales et de monastères, nos musées constituent une véritable magie. Celle-ci incarne notre culture européenne, de l’Atlantique à l’Oural, dirait le général de Gaulle.
Matthieu Delaygue