La paille et le grain
Notre civilisation moderne avance très vite et tâtonne sur les sentiers de l’Apocalypse, du troisième âge et du troisième homme. Notre culture suit le même chemin. Elle va de toutes parts. Elle sait qu’elle se modifie. Le transhumanisme est conjoint à la mondialisation des esprits, tandis que le monde intellectuel cherche toujours à comprendre où seront les grands équilibres du futur. Les grandes théories du droit normatif et du droit naturel se trouvent en principe toujours opposées, mais le contexte a changé depuis le siècle dernier qu’un éventuel débat de fond entre ces deux pôles de la pensée politique serait aussi vide de sens que pourrait l’être de répondre à l’Islamisme par la lecture obligatoire de Kant dans les maternelles. Il en est de même pour les théories militaires avec leurs grandes analyses stratégiques à la mode. En moins de 20 ans, on est passé de la théorie de zero dead, autrement dit zéro mort sur le champ de bataille du côté occidental, à la théorie de la guerre dissymétrique, elle-même mise à mal par la réalité des faits sur le terrain. Et que dire de l’échec des théories économiques, et d’un éventuel débat entre marxistes, keynésiens et convertis à la pensée libérale ? Aucune donnée du XX e siècle ne peut être réellement prise en compte pour bâtir un débat sur l’économie de demain. On n’a même pas été capable de prévoir la grande crise boursière de l’année 2008.
Tout cela simplement parce qu’aucun de nos grands penseurs remarquables ne pouvait imaginer les mutations techniques de notre début de XXI e siècle. Et ceux qui les ont devinées se sont le plus souvent trompés dans leurs
conclusions. L’Histoire dans tout cela ne fait que compter les projets, les ambitions, les affrontements, pour en rendre compte. Une chose est sûre : il n’y a pas eu mort de l’Histoire, comme l’affirmait un historien japonais à la suite de la Chute du mur de Berlin. Il se peut même que l’Océan pacifique soit le grand théâtre de l’Histoire future et sanglante de notre siècle. Face à ces difficultés de la théorie, nous vous présentons un numéro de notre magazine qui va replonger dans les sources visionnaires du christianisme et dans leurs réalités historiques, au fil des siècles. Nous parlons ainsi de la Suisse, de la France, de nos châteaux, de nos provinces, de nos départements, de nos villes et anciens villages, de cette patrie d’autrefois, charnelle parce qu’elle reposait sur des repères stables, où chaque vallée, chaque colline avait ses familles sédentaires depuis des siècles, avec des patois, et des odeurs, même, particulières, puisque l’eau, l’herbe que mangeaient les vaches pouvaient représenter des variantes. Les objets pouvaient être eux aussi fabriqués de façon différente. Et certaines de ces différences montraient toute la limite de l’État centralisateur. Se souvient- on encore que : Dans l’esprit cauchois, la France est coupée en deux : le Nord et le Sud de la Seine. Au Nord, jusqu’à la Belgique, les
Français travaillent mais au sud, jusqu’à Marseille, ils ne font rien…
Ainsi, rien n’avait changé depuis César qui distinguait la Gaule du côté Sud de la Seine et la Belgique du côté Nord. Et l’on était dans les années 1950 lorsqu’un sage, le Père Alexandre, écrivit ces mots. Il était curé de Wattetot, en pays de Caux, à quelques kilomètres de Fécamp. Du côté Nord de la Seine. Notre monde change. Et l’Histoire, non morte, est en train de sonner le glas de toute la société du Baby-boom. Parce que les donnes nouvelles vont nous mener à d’autres grilles de lecture, non définies encore… Nous sommes en phase de transition…
Matthieu Delaygue
- En référence à l’ouvrage de François Mitterrand publié entre 1971 et 1974.