Une analyse de l’Existant

Cela fait dix ans que la nouvelle formule de La Revue de l’Histoire existe… En octobre nous fêtons le n° 80 de ce magazine national créé en 1999. Il fut en format de poche, puis en format carré, puis en grand format... Il a voulu suivre l’histoire de la France, de ses régions et de ses départements, de tout son patrimoine merveilleux. Mais comment transmettre l’Histoire ? Comment la raconter pour qu’elle ne soit pas ensevelie par le temps ? Et pour cela, comment nous approprions-nous notre histoire ? Une chose nous est apparue évidente : La motivation d’un acteur de l’Histoire a toujours plusieurs facettes, à l’image de chaque idée sur cette terre, de chaque cellule vivante. La grande question n’est pas : y a-t-il une vérité en Histoire ? Elle est plutôt : comment telle chose a-t-elle pu se produire ?

« La vie n’est qu’une ombre errante ; un pauvre acteur
Qui se pavane et s’agite une heure sur la scène
Et qu’ensuite on n’entend plus ; c’est une histoire
Racontée par un idiot, pleine de bruit et de fureur,
Et qui ne signifie rien.
« 

En écrivant ces mots de Macbeth, Shakespeare illustre ce que peut être une volonté de puissance où se joue l’éternel débat de l’individu entre sa réalité et son néant, son esprit et son corps, entre le diable et le bon dieu. Mais nous ne sommes ni juges, ni prêtres, ni statue du commandeur. Nous avons essayé d’éviter, le plus possible, cette tentation moraliste de juger comme nous avons lutté contre celle souvent immorale de dénigrer.

Il existe un chemin prudent pour raconter l’Histoire. C’est de penser comme dans Autant en emporte le vent à la façon raisonnable de Mélanie Wilkes : « Nous n’agissons pas tous de la même manière… c’est mal de juger les autres d’après nous-mêmes.« 

C’est pour cela, peut-être, que La Revue de l’Histoire, attache tellement d’importance à l’art et à ses musées,à l’intérieur de l’histoire du monde avec sa culture magnifique. Cela permet de situer le débat sur un autre plan, avec une vision de l’absolu et de la vérité à la portée de tous.

La vie humaine, quant à elle, est bien trop courte.L’Histoire est un long terme qui ne peut, en conséquence,agir que par globalité. Elle n’est pas un microcosme mais elle touche au macrocosme, dans l’indifférence d’un vaste monde qui continue sa course.

La recherche de l’humain, du profondément humain,devient alors une sorte de mystère. Nul ne sait quel va être son rôle, quelle étincelle l’habitera. Les personnages deviennent alors romanesques, du seconde classe au ministre d’État, parce que leur destinée est aléatoire. Et lorsque nous lisons de l’Histoire, nous sommes tentés de prendre la place du seconde classe ou du ministre d’État, dans un rêve qui est celui du mage lorsqu’il fait apparaître des personnages. Le monde entendu est devenu une sorte de fiction qui nous fait rêver la vie en un flux d’images. C’est le succès de l’Histoire racontée. Où le jeu est un autre, où le je est remplacé par le nous,et aussi par le νουσ, c’est-à-dire l’esprit.

C’est ainsi que nous entrons dans la vérité, avec cette relativité des choses qui ont un sens profond, celui de l’imaginaire et du réel, pour cerner la vie des gens, des animaux, des objets, des monuments et de leurs chefs d’œuvre,de tout ce qui est vivant et de ce qui est mort.

Matthieu Delaygue