Futurs antérieurs

Sous notre sol sont encore enfouis des trésors. Des objets ou des mystères que l’on retrouvera peut-être un jour. La légende de continents engloutis, celle des bateaux échoués au fond des mers hantent les esprits des marins et des historiens. Il reste tant de choses à fouiller en Égypte ou en Auvergne. Il reste tant de forêts qui attendent leurs archéologues. Dans Les Mémoires d’Outre-tombe, Chateaubriand raconte avoir vu ces anciennes et grandes murailles en Amérique du Nord, là où vivaient des peuples disparus dont les Indiens ne se souvenaient pas l’histoire.
Ce sont les sciences du futur qui nous mèneront vers ces passés lointains. Une aventure humaine formidable se prépare, avec ses enjeux intellectuels et philosophiques dont on ne peut savoir encore la portée.
Nous sommes loin d’une acculturation de nos populations. Notre société est en pleine compréhension de nouveaux systèmes de pensées et d’informations. Les jeux vidéos de stratégie, les films d’histoire ont un niveau de réalisme et de culture jamais atteint auparavant. Les analyses historiques sont de plus en plus transversales. La possibilité d’utiliser des banques de données multiples, presque en temps réel, le déclassement régulier d’informations confidentielles, vont ouvrir des débats de tout horizon, intégrant la sociologie, l’art, la philosophie, avec des analyses géostratégiques qui ne pouvaient être menées autrefois que dans des centres de décision restreints.
Peut-on penser avec pessimisme que trop d’informations noient l’information essentielle ? Que les jeux de manipulation peuvent s’accentuer, que les techniques de désinformation, qui ont toujours existé, vont elles aussi profiter de cette suite d’avancées techniques ? Rien n’est moins sûr. Autrefois on pouvait bloquer une information dangereuse, la faire disparaître. De nos jours, les ondes sont un véritable boulevard où n’importe qui peut se promener. Il y a de moins en moins de secrets qui peuvent être occultés sur le long terme. Et le manque de temps n’est plus un paramètre négatif. Les techniques de tri des données s’améliorent régulièrement. Tout cela mènera à des révolutions en matière de logique, de morale et d’intuition. Et peut-être en matière de langage. Mais le sentiment artistique, les grandes règles de comportements humains et politiques, les grands débats sur le sens de la civilisation et de l’histoire en seront-ils pour autant modifiés ? Nul ne le sait…L’avenir est toujours un pari sur lequel on ne sait pas grand-chose.

Matthieu Delaygue