Histoire de la Franc-Maçonnerie,
des Anciens Grecs ou des savants Égyptiens... Histoire du peuple Croate ou du Vatican... L'Histoire est un monde où des souffl es sont créés par certains groupes, ils forgent des structures qui vont encadrer les peuples et leur donner une destinée. En quelle mesure le romantisme allemand a-til façonné la pensée du pangermanisme, puis du nazisme! ? Qu'est-ce que le Kulturkampf a donné à l'Europe ? La pensée égalitaire de Robespierre ou de Gracchus Babeuf inspire-t-elle encore nos politiques administratives ou culturelles ? À travers ces simples exemples, c'est notre monde moderne qui apparaît, contradictoire, hésitant, avec ses lignes directrices et ses affrontements futurs ou en cours. Peut-on saisir tous les enjeux essentiels de l'avenir sans s'imprégner de l'Histoire des civilisations qui semblent à la fois avancer vers la lumière jusqu'à l'obscurité liée à leur disparition!?
LES ANTIQUES LIBATIONS DE VINALIA
LE MUSÉE DE SAINT-ROMAIN-EN-GAL NOUS PROPOSE AU DÉBUT DE L'AUTOMNE UNE MANIFESTATION, VINALIA. ELLE CONSTITUE
UN HOMMAGE À NOS ANCÊTRES GALLO-ROMAINS, À LEUR VIE QUOTIDIENNE ET À LEURS
VENDANGES. À DEUX PAS DES VIGNOBLES DES CÔTES-RÔTIES
ET DE CONDRIEU, EN PLEINE SAISON DES
RÉCOLTES. AVEC RECONSTITUTION DES VENDANGES À LA FAÇON GALLO-ROMAINE DES PREMIERS SIÈCLES APRÈS J.-C. : EXPLOITATION DE
LA VIGNE, ÉLABORATION DU VIN SELON LES MÉTHODES ANTIQUES, CONSOMMATION DES BOISSONS FABRIQUÉES ET DÎNERS OÙ SERONT SERVIS
LES PLATS HABITUELS DES GALLO-ROMAINS. LES ARCHÉOLOGUES, AGRONOMES, BOULANGERS, AYANT OEUVRÉ À LA RECONSTITUTION SERONT PRÉSENTS.
Cette fête - où il faut réserver sa place
afin de pouvoir participer aux banquets et libations
accompagnées d'explications - est organisée avec l'INRAP*.
Une rencontre scientifique précèdera cette
journée sur l'actualité archéologique de la vigne et
du vin en Gaule.
UNE GAULE OUVERTE SUR LE MONDE INTERNATIONAL
Saint-Romain-en-Gal est
un petit village de 1!700 habitants qui abrite un des musées
prestigieux de l'archéologie antique. Nous sommes au bord
du Rhône, ce magnifique fleuve qui était le poumon de
l'Empire romain. Ses sources sont toutes proches en
Suisse de celles du Rhin. Il partage en deux l'Europe,
il était, déjà avant la conquête de la Gaule, un pôle
fluvial et commercial important. Il offrait un débouché sur les
lointaines terres du Nord, et menait sur la Méditerranée jusqu'en
Égypte.
Vienne est de l'autre côté du Rhône. Elle
était la capitale des Allobroges et s'étendait sur les deux
rives du fleuve. C'était une des villes gallo-romaines parmi
les plus importantes. Elle était au coeur de ce monde
de voyages, de transactions et de productions que
constituait l'Empire romain. À cette époque, les vins des
Allobroges de la cité de Vienna étaient réputés. On les trouvait
sur les tables prestigieuses de l'Empire. Celse, Pline l'Ancien,
Martial ont confirmé dans leurs écrits cette réputation
qui perdure. Mais il n'y avait pas que le vin. Vienna
avait de superbes villas, des centres artisanaux, de
magnifiques bâtiments publics. Le territoire de l'ancienne ville
se partage désormais en deux départements : Vienne, sur
la rive gauche, rattachée au département de l'Isère.
Saint- Romain-en-Gal et Sainte-Colombe, sur la rive
droite, rattachées au département du Rhône.
LA REDÉCOUVERTE DU MONDE OUBLIÉ
L'intérêt pour les ruines
antiques de Saint-Romainen-Gal date du début du XVIe siècle et de la Renaissance. Un livre de Nicolas Chorier,
avocat du Parlement de Grenoble, et publié en 1658,
décrit joliment les vestiges de toute cette gloire. On découvrit au fil du temps de magnifiques
et nombreuses mosaïques.
Crédits pour l'ensemble des photos
Vinalia : © Paul Veysseyre - musée-gallo-romain de Saint-Romain-en-Gal -
Vienne
En 1967, en préalable à la construction d'un lycée, les archéologues commencent une grande fouille au lieu-dit la
Plaine. Et c'est la surprise... Ce sont les vestiges
d'une véritable ville qu'ils découvrent... Ils
mettent à jour des grandes maisons aux aménagements
luxueux, des voies dallées, des thermes publics, des entrepôts
et des ateliers. Cela leur permet de recomposer un
paysage urbain dont l'organisation et le souci de
confort sont stupéfiants par leur modernité. Le
département du Rhône fit jouer ses droits de préemption. Il
ne restait plus qu'à continuer les fouilles et bâtir un
musée magnifique. Tout un jeu de vitres et de lumières met en
valeur la beauté et le sens artistique des objets
présentés. Le site archéologique autour du musée est
exceptionnel. Sur plusieurs hectares, on y voit les
vestiges du riche quartier résidentiel de la colonie romaine
de Vienne. Les maisons luxueuses voisinent avec les
thermes, les boutiques, les échoppes, les ateliers...
*Institut national de recherches archéologiques préventives.
Artisans d'histoire
À LA RECHERCHE DU TEMPS PASSÉ
Privilégiant la
reconstitution historique et l'expérimentation archéologique, le musée
galloromain de Saint-Romain-en-Gal propose une mise en scène des pratiques quotidiennes de l'époque
romaine ! : viticulture, cuisines, médecines et
artisanats. Les céréales tenaient une place importante dans
les repas. C'est d'ailleurs ce que recommandent de nos
jours les diététiciens qui estiment que nous mangeons
bien trop de viandes et de charcuteries. Le Gaulois
mangeant à chaque repas un sanglier qui gambadait le matin
même dans la forêt se trouve donc être un mythe de bande
dessinée. Le vin, l'huile d'olive et les céréales
constituaient la base de l'alimentation, sous forme de soupe, de
bouillie, de pain ou de boissons fermentées. Le jardin botanique raconte l'importance des
plantes dans la vie quotidienne des Gaulois et des
Romains. On y trouve une cinquantaine de variétés : ail,
aneth, coriandre, cumin, cassis, gentiane, menthe, moutarde,
pavot, persil, verveine, etc. Ces plantes étaient aussi
utilisées dans la fabrication du vin, mais aussi pour
agrémenter les potages, élaborer des teintures et des médicaments.
Le domaine viticole antique a été inauguré
en 2008. Il s'étend sur plus de 3 000 m2 et il contient aussi un jardin botanique et des reconstitutions de
fours de potiers gallo-romains. Plus de 300 pieds de vigne de
15 cépages répertoriés parmi les plus anciens ont été
choisis. Les pieds de vigne sont présentés selon six
modes de conduite différents utilisés à l'époque romaine. Deux
pressoirs ont été reconstruits à l'identique : un
pressoir à levier et un pressoir à double vis. On dénommait Vinalia le
début des récoltes et le vin nouveau, avec les festivités qui
accompagnaient ce moment important de l'année, où Bacchus était
particulièrement honoré.
UNE TRADITION GALLO-ROMAINE DEVENUE FRANÇAISE
L'habitude
du vin continua en France jusqu'à nos jours. Sans le vin, le soldat
de 14 aurait-il aussi bien tenu devant les Allemands ? Ceux-ci
avaient un déficit en approvisionnement d'alcool. On leur donnait du
schnaps qui
était souvent mélangé avec de l'éther. Lorsque ce mélange
infect était mal dosé, les troupes étaient incapables de
sortir des tranchées... Cela arriva à un régiment lors
de la bataille de Verdun en 1916. De même, lors de la victoire de la
Marne, en
septembre 1914, certaines troupes allemandes avaient
trop bu les stocks des caves de champagne, en
particulier à Épernay. Elle furent incapables de
combattre. Ce qui prouve qu'elles n'avaient pas forcément
l'habitude de boire du bon vin. L'armée française avait emménagé des
lignes
de chemin de fer jusqu'au deuxième ligne,
c'est-à-dire à quelques kilomètres du front, pour faire
arriver le vin par trains entiers. Le général Pétain, après les
révoltes de Verdun, limita le vin à un demi-litre par
jour pour les troupes au repos. C'était d'ailleurs la dose
dans les grandes manoeuvres d'avant-guerre. Sans
compter le petit verre d'alcool fort d'une dizaine de
centilitres qui était une tradition... En revanche, il y
avait possibilité pour le soldat français d'acheter librement
auprès de marchands privés - cabaretiers, vendeurs
itinérants, grossistes, paysans, des bouteilles de 1
litre... Et là, généralement, le nombre n'était pas limité. On a dit que
le vin de cette époque était
moins fort en degré. Ce qui était faux. La France, la
Gaule, avait toujours bu du vin. Dans un très
sérieux livre de médecine familiale, on recommandait aux
cardiaques de ne pas dépasser la dose de ... 4 litres par
jour... Et il ne s'agissait pas de vin à 6 degrés...
Pasteur luimême recommandait de boire du vin tous les jours. Il est vrai
que sa famille était
viticultrice en Arbois. Balzac reprend ce mot de l'époque dans Le père Goriot : du vin pour la soif... Ce qui prouve que lorsque l'on avait soif,
on ne buvait pas de l'eau mais du vin.
LE SENS DE LA FÊTE
Lorsque César envahit la
Gaule, il était financé, entre autres, par les producteurs de vin romains,
qui lui demandèrent en échange de leur aide,
d'interdire le vin de la région de Reims qui leur
faisait trop de concurrence. Même l'Angleterre buvait du
vin. L'Europe de l'Ouest a vécu sur l'économie et la
culture, au sens culturel, du vin... C'était tout un système,
tout un rituel. Les Romains avaient le dieu Bacchus, qu'ils
n'hésitaient pas à représenter complètement ivre. Les
bacchanales n'étaient pas un vain mot. Le vin était
significatif de bonne santé, de joie et de richesse. Selon les
régions, il était plus ou moins bon. Certains supportaient
très mal le transport. Leur vente était uniquement
locale. Au temps de Rome, on le mettait très alcoolisé en
amphores. La forme particulière de celles-ci leur
permettaient de pouvoir s'encastrer les unes dans les autres, ce qui
évitait à la fois la casse et le manque de place. On a
retrouvé des épaves dans le Rhône de bateaux romains dont
les cales étaient remplies d'amphores. On en a
retrouvé des stocks aussi dans des fouilles préventives à
Toulouse. Depuis des milliers d'années, on savait fermenter
des fruits, et en particulier les raisins, on savait cultiver
les vignes, et on savait boire. À une époque où l'eau n'était
pas sûre, et pouvait transmettre la mortelle typhoïde, il
fallait bien boire des boissons fermentées, qui tuaient ces
petites bêtes qui donnaient la mort et que l'on appelle
depuis virus ou microbes. Dans les pays belges et
hollandais, dans toute une partie de l'Allemagne où la vigne pousse
mal à cause du froid, on avait la bière que l'on donnait
même aux enfants, afin d'éviter les eaux infestées.
Matthieu Delaygue (extrait)
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La Revue de L’HISTOIRE — N° 72
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